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Pourquoi Michel-Ange a rajouté des petites cornes à son célébrissime Moïse ?

Pourquoi Michel-Ange a-t-il mis de petites cornes à son célébrissime Moise? S'est-il référé à la paracha Ki Tissa qui mentionne que lorsque Moïse est descendu du Mont Sinaï avec les 2 tables, son visage rayonnait d’une lumière aveuglante?
Pourquoi Michel-Ange a rajouté des petites cornes à son célébrissime Moïse?

Certains mystères naissent de malentendus et c’est bien ainsi. Parfois aussi, ils se fondent sur des vérités invérifiables dont les sources remontent à des temps immémoriaux et plongent dans des secrets véhiculés par la tradition orale. Enfin, ces mêmes mystères, qui alimentent des interrogations vieilles de plusieurs siècles, peuvent également et tout simplement être le fruit d’un clin d’œil irrévérencieux et laissés à la compréhension de quelques initiés. Le mystère dont nous traiterons ici concerne les deux petites cornes qui ornent le visage de la célébrissime statue du Moïse de Michel-Ange : des petites protubérances qui, jusqu’à présent, divisent et continuent d’animer le débat.

Dans la ville éternelle de Rome, non loin du Colisée, se trouve la basilique Saint-Pierre. Derrière la façade relativement modeste de l’église se cache l’une des œuvres d’art les plus célèbres au monde, qui a fait de ce lieu de culte un peu ordinaire un emplacement culturel à haute valeur ajoutée : la sculpture de Moïse érigée dans le cadre du monument dédié au Pape Jules II.

Michelangelo di Lodovico Buonarroti Simoni — Michel-Ange —, l’un des artistes les plus éminents de la Renaissance, a créé la sculpture qui devait orner le tombeau spectaculaire commandé par le Pape lui-même. Les travaux commencèrent en 1505 pour se terminer dix ans plus tard. La sculpture fut, elle, réalisée entre 1512 et 1515. Le Pape, décédé deux ans auparavant, ne put voir l’œuvre achevée.

Michel-Ange a choisi de représenter Moïse assis — assimilant ainsi la figure de Moïse, meneur et leader du peuple juif, à Jules II, meneur des chrétiens — tenant sous son bras droit les Tables de la Loi, tandis qu’il touche sa barbe ondoyante. Les tables fermées seraient celles ré-écrites par D.ieu et non les premières, car, dans ce cas, Moïse aurait été classiquement représenté debout, les jetant à terre. La tête tournée vers la gauche, son regard courroucé fait allusion à la faute des Hébreux qui ont adoré le veau d’or. De sa chevelure bouclée, sortent deux étranges bosses, deux petites cornes.

Michel-Ange les a-t-il ajoutées pour se moquer du Pape ou prendre de la distance avec le monde chrétien ? Cette décision artistique est-elle basée sur une erreur d’interprétation du texte juif ou bien répondent-elles à une source midrashique existante ?

Trois thèses qui méritent d’être analysées mais qui ont un point commun : l’intérêt profond de Michel-Ange pour le judaïsme.

« Michel-Ange a été l’artiste de la Renaissance le plus tourmenté par des expériences religieuses et philosophiques diverses et profondes ; la source de certaines d’entre elles doit être décelée dans tout ce que le XVIe siècle a trouvé dans son ressourcement juif. Il a vécu à Florence de 1494 à 1498, sous Savonarole qu’il admirait, mais qu’admirait aussi, de loin, Don Isaac Abravanel. Il a vibré à ce que l’on convient d’appeler pudiquement le « néoplatonisme », un courant philosophique dont le succès au XVIe siècle est, en réalité, dû entièrement à la pénétration intense de la Kabbale juive dans les âmes chrétiennes. La fréquentation de Pic de La Mirandole par Michel-Ange à Florence dès 1481 pourrait suffire à inviter à une étude sur Michel-Ange et la Kabbale. Enfin, le goût de Michel-Ange pour l’Ancien Testament, qui lui a inspiré plus de chefs-d’œuvre que le Nouveau, pourrait ajouter encore une nuance supplémentaire à ce background à partir duquel des liens de cause à effet se dessinent entre Michel-Ange et le judaïsme » écrit André Neher dans la Revue d’Histoire et de Philosophie religieuses publiée en 1975 et intitulée Michel-Ange et le Maharal de Prague. Essai sur la parenté de leur œuvre créatrice.

Cette attirance et cette proximité avec les sources juives sont le socle du mystère, car ce sont bien elles qui ont donné naissance à la représentation de cet étonnant Moïse.

Retour au texte

Dans les derniers versets de la paracha de Ki Tissa, dans le livre de l’Exode, il est écrit :

« Or, lorsque Moïse redescendit du Mont Sinaï, tenant en main les deux tables du statut — de la Loi —, il ne savait pas que la peau de son visage était devenue lumineuse lorsque D.ieu lui avait parlé. Aharon et les enfants d’Israël regardèrent Moïse, et voyant rayonner la peau de son visage, ils n’osèrent l’approcher ». Et plus loin : « Moïse ayant achevé de parler couvrit son visage d’un voile. » Les allusions se poursuivent encore dans le même verset sur les moments où Moïse enlève le voile – lorsqu’il se présente devant l’Eternel pour communiquer — et le remet — lorsqu’il termine de communiquer.

La racine hébraïque « k-r-n » peut signifier un rayon de lumière, mais également une corne. Cela dépend s’il s’agit d’un verbe ou d’un nom.

Or, les versets hébreux originaux de la paracha font explicitement référence à un verbe ou à une action — rayonnant/rayonner — et non pas à un nom — corne. Il semblerait que cette subtilité ait été ignorée, sciemment ou pas, par les traducteurs de Bible.

Michel-Ange et de nombreuses générations précédentes de chrétiens européens connaissaient la version Vulgate du texte biblique — en grande partie l’œuvre d’un homme du nom de Jérôme. Jérôme, qui deviendra plus tard saint, était un prêtre, théologien et traducteur, qui traduisit la Bible en latin, à la fin du IVe siècle de notre ère, en s’appuyant sur des traductions grecques antérieures — Septante — et en étudiant même l’hébreu pour comprendre le texte de ‘’l’Ancien Testament’’ dans l’original.

Jérôme connaissait certainement les deux significations, mais il a choisi de traduire « karan » par « cornu », une erreur que les traducteurs précédents avaient réussi à éviter.

La célèbre traduction grecque de la Bible, connue sous le nom de Septante, explique en effet que le visage de Moïse était « glorifié » ou « glorieux », ce qui est une traduction raisonnablement précise.

Jérôme s’est également servi de la traduction grecque réalisée par Aquila de Sinope. Aquila a grandi, au IIe siècle, dans ce qui est aujourd’hui la Turquie. Il s’est converti au judaïsme et certains l’identifient à Onkelos, que nous connaissons comme l’homme qui a traduit la Torah en araméen.

Aquila a effectivement traduit la racine hébraïque « k-r-n » par « corne », en précisant que le visage de Moïse était orné de ce qui avait « l’apparence » de cornes.

Il faut savoir que dans les temps anciens, les cornes symbolisaient le pouvoir, c’est pourquoi des cornes étaient parfois attachées aux casques des guerriers.

Jérôme aurait donc suivi Aquila et utilisé le mot cornutam/cornuta en latin, signifiant cornes d’animaux et non rayons de lumière. Problème : l’utilisation du mot « cornatum » pourrait aussi avoir une dimension antisémite. ‘’Le Nouveau Testament’’ et la foi chrétienne dans son ensemble attribuent régulièrement la présence de cornes à des créatures monstrueuses ainsi qu’à Satan lui-même. ‘’L’Ancien Testament’’ étant également sacré pour les chrétiens, il se pourrait que Moïse, en tant que représentant du peuple juif, ait été implicitement décrit comme étant le chef d’un peuple ou d’une nation diabolique, et que les cornes aient ainsi servi de moyen pour diaboliser le peuple juif.

Autre élément ajoutant à la confusion, les cornes peuvent aussi faire référence à la symbolique du grotesque lié à l’infidélité. Dans ce cas, Michel-Ange aurait cette fois voulu ridiculiser le Pape commanditaire de l’œuvre.

Dans ces deux derniers cas, Michel-Ange, philosémite comme le décrivait André Neher, aurait voulu indiquer la distance qu’il entretenait avec le monde chrétien, ou du moins avec les aspects clairement antisémites qu’il manifestait contre le peuple juif.

Reste à présenter la thèse la plus poétique de toutes, car s’appuyant sur le midrash, l’exégèse. Lorsque Moïse a écrit la Thora, il est resté un peu d’encre d’ordre divine dans la plume. Cette goutte d’encre tombée sur son front serait la source du rayon lumineux qui ornait le visage du plus grand prophète de l’histoire juive.

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