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Robert Aumann et la théorie des jeux

Quel est le rapport entre la vengeance, la menace, la confiance et le don ? Derrière cette question se cache la réflexion de toute une vie, celle d’un homme hanté par l’expérience de la guerre et de la dévastation.
Robert Aumann et la "théorie des jeux"

Né en 1930 à Francfort, Robert John Israël Aumann avait huit ans lorsque sa famille a fui l’Allemagne pour les États-Unis, deux semaines avant les pogroms de la nuit de Cristal. Issu d’une famille orthodoxe, il étudie à la Yeshiva avant d’entreprendre des études de mathématiques au MIT où il obtient son doctorat en 1955. L’époque est celle de la guerre froide, qui voit l’émergence du concept d’équilibre de la terreur, concept qui trouve son fondement théorique dans la théorie des jeux, dans laquelle Aumann se spécialise. Un an plus tard, il fait son Alyah en pleine guerre du Sinaï et commence à enseigner à l’Université hébraïque de Jérusalem.

Branche des mathématiques, la théorie des jeux analyse les interactions stratégiques entre personnes (comme dans le cas du dilemme du prisonnier), acteurs (États, entreprises…) ou joueurs (échecs, poker…) dans un contexte concurrentiel, conflictuel ou plus généralement caractérisé par des intérêts a priori divergents. Ses applications pratiques sont nombreuses, en particulier dans le champ des sciences humaines, où elles portent sur des domaines aussi variés que la géopolitique, la stratégie militaire, la sociologie, la psychologie, l’anthropologie, et bien sûr l’économie.

Son illustration la plus célèbre est celle du dilemme du prisonnier, dans lequel deux membres d’un gang emprisonnés et ne pouvant communiquer entre eux sont confrontés au choix d’avouer (et par là-même de dénoncer leur partenaire) ou bien de refuser de coopérer avec les autorités, sachant que si l’un des deux avoue et l’autre non, le premier sera remis en liberté alors que le second prendra trois ans, que si les deux avouent, ils écoperont chacun d’une peine de deux ans, et que si aucun n’avoue, ils recevront chacun une peine d’un an sur la base de charges mineures que la police détient contre eux.

L’incitation à trahir son complice étant plus forte (mise en liberté si l’autre ne trahit pas) que l’incitation à garder le silence (un an de prison si aucune ne coopère avec les autorités), la rationalité supposée de chacun va l’amener à trahir, ce qui va conduire à un résultat sous-optimal pour les deux (deux ans de prison) par rapport à une situation de coopération mutuelle (si aucun ne trahit l’autre) qui aurait limité leur peine à un an. En d’autres termes, la rationalité pure des acteurs placés en situation conflictuelle a peu de chances de déboucher sur l’intérêt collectif.

Aumann montre que cette conclusion paradoxale est remise en cause dès lors que les jeux auxquels sont confrontés les acteurs sont répétitifs. Aucune action humaine, en effet, ne reste sans conséquences. Toutes laissent des traces sous la forme d’une réputation qui influencera la décision des autres acteurs lors des prochaines confrontations. Faire défaut ou trahir la confiance d’autrui n’est rentable qu’une fois et qu’un temps, tant que le fuyard n’est pas rattrapé par sa réputation… ou par ses partenaires lésés. Inversement, choisir de coopérer crée une situation de confiance qui est propice à la propagation des comportements coopératifs de la part des autres acteurs.
Dès lors, des phénomènes comme la vengeance ou le don, qui échappent a priori à la logique du calcul rationnel classique (“qu’est-ce que ça rapporte ?”), prennent leur sens au niveau socio-culturel, dévoilant une forme de rationalité élargie qui intègre les conséquences infinies de nos actes. La vengeance dissuade en effet les stratégies de trahison, tandis que l’aide gratuite apportée à autrui favorise la probabilité de recevoir une aide en retour en cas de besoin.

Cette réflexion conduit à porter un nouveau regard sur la rationalité. Qui ne souhaite pas la paix ? Et qui pourrait soutenir que la guerre est rationnelle ? Pourtant, soutient Aumann, le seul moyen d’éviter la guerre est d’être prêt à la faire. Tout comme le seul moyen d’éviter la destruction mutuelle à l’époque de la guerre froide était de poursuivre la course aux armements nucléaires, en dépit du gaspillage massif de ressources que cela signifiait. Prévenir le retour de la guerre suppose de créer des incitations susceptibles de dissuader les parties en présence d’y recourir. Céder à la menace de l’ennemi ne peut que l’inciter à demander plus, ce qui est le plus court chemin vers la guerre. Le monde a appris à cela à Munich en 1938 mais a tendance à l’oublier.

De même, afficher sans retenue son désir d’arriver à un accord de paix ne peut qu’encourager l’extorsion de nouvelles concessions, comme Israël en a si souvent fait l’expérience. Renoncer à s’armer au nom de la paix équivaut à inviter l’agression. La seule option crédible, dans un environnement hostile, est de maintenir un degré de dissuasion maximal. Dans les termes d’Aumann, « la possibilité du désastre doit être réelle : vous ne pouvez pas faire croire à autrui que c’est sérieux tant que ce n’est pas sérieux ! » Un message qui n’a rien perdu de son actualité.

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