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La terre pour tous : le droit de la terre selon la Torah

La distribution équitable des terres est le socle sur lequel s’est construit le premier Etat hébreu à l’époque de Josué. Elle est aussi le fondement sur lequel repose l’édifice social de la Torah.
La terre pour tous : le droit de la terre selon la Torah

Au terme des sept années de conquête de la terre promise, il ne fallut pas moins de sept ans pour organiser la répartition des terres entre les tribus et familles d’Israël[1]Rachi sur Nombres 26, 53..et mettre en place un régime de stricte égalité de la propriété foncière. Le terme de propriété est toutefois imprécis dans le contexte de l’économie biblique. La terre en effet n’appartient ni à la collectivité, ni aux particuliers. Le Lévitique (25, 23) est explicite sur ce point : « La terre est à Moi » dit l’Eternel, « vous êtes seulement des habitants domiciliés chez Moi ». Les Psaumes réaffirment cette notion : « De David : psaume. A l’Eternel la terre et tout ce qu’elle porte, le monde et ceux qui l’habitent »[2]Psaumes 24, 1.. Mais ils la précisent aussi : « Les cieux sont les cieux de l’Eternel, la terre, Il l’a donnée aux hommes »[3]Psaumes 115, 16.. La Terre appartient au Créateur qui l’a confiée aux hommes « pour la cultiver et la garder »[4]Genèse 2, 15.. Comme le souligne le Rav Elie Munk dans son ouvrage sur La justice sociale en Israël[5]Elie Munk (1948), La justice sociale en Israël. Editions de la Baconnière, Neuchâtel (Suisse), p. 76., le régime foncier décrit par la Torah n’est pas à strictement parler un régime de propriété privée : les Hébreux qui prennent possession de la terre d’Israël n’en reçoivent pas la propriété, seulement la possession. Nous reviendrons sur cette distinction essentielle plus loin.

 

Les instructions concernant la répartition de la terre figurent au chapitre 26 du Livre des Nombres, alors que les Enfants d’Israël se trouvent sur les steppes de Moab, de l’autre côté du Jourdain, face à Jéricho. La distribution elle-même est longuement décrite dans le Livre de Josué (chapitres 13 à 21).

 

Nombres 26[6]La traduction est de l’auteur, d’après les commentaires des Sages.

52) L’Eternel parle à Moïse pour dire :

53) C’est entre ceux-là que tu vas répartir la terre en héritage, selon le relevé des noms.

54) Aux plus nombreux tu donneras une plus grande part, aux moins nombreux une part moindre, chaque tribu recevra sa part selon le compte de ses membres.

55) Toutefois, c’est d’après le Goral que la terre sera répartie, selon les noms des tribus de leurs pères.

56) Par la bouche du Goral elle sera répartie, qu’il s’agisse d’une terre de grande valeur ou de moindre valeur.

La répartition des terres s’effectue par tribu[7]A l’exception de la tribu de Levi qui, étant consacrée au service de l’Eternel, ne prend pas part à la distribution de la terre et se voit attribuer 48 villes et les pâturages qui les … Continue reading puis par famille, selon le nombre d’hommes de plus de vingt ans faisant l’armée, conformément au recensement rapporté au début du chapitre 26, qui intervient après la guerre contre Midian. Elle ne s’opère pas dans des conditions naturelles mais par la voix du Goral. Le Goral mentionné à deux reprises dans ce passage ne désigne pas un simple tirage au sort, comme on le voit dans certaines traductions. Rachi rapporte l’enseignement des Sages dans le Traité Baba Batra (122a) du Talmud de Babylone qui décrivent comment les choses se sont passées :

 

Rachi sur Nombres 26, 54

El‘azar HaCohen était revêtu des Ourim et Toumim et annonçait sous l’inspiration divine : « Si telle tribu sort de l’urne, tel territoire sort avec elle ». On avait inscrit le nom des tribus sur douze bulletins, et celui des douze territoires sur douze autres bulletins, qu’on avait mélangés dans une urne. Le chef de tribu mettait la main dans l’urne d’où il retirait deux bulletins : sur l’un figurait le nom de sa tribu et sur l’autre le nom du territoire qui lui était attribué. Le Goral lui-même criait alors : « Moi, le Goral, j’ai attribué tel territoire à telle tribu ! », ainsi qu’il est écrit : « Par la bouche du Goral » (Midrash Tanhouma sur Pinhas 6). Tout cela fut réalisé selon l’évaluation monétaire et non selon l’étendue des terres, celles-ci étant d’inégales valeurs (…).

Le principe d’équité est assuré a posteriori par l’évaluation de la valeur des terres. Celle-ci fut réalisée par le Beth Din de Josué en présences des chefs de tribus, qui fixa la valeur de chaque terrain en fonction de sa fertilité, de la distance qui le sépare de Jérusalem (plus la distance est grande, moins le prix est élevé) et de sa proximité des frontières du pays (plus la proximité est grande, moins le prix est élevé). L’égalisation des parts de chacun en valeur fut ensuite réalisée par des transferts d’argent des familles ayant hérité d’un terrain de plus grande valeur au profit de celles s’étant vu attribuer un terrain de faible valeur.

Il faut souligner que l’octroi de terrains de valeur identique à chaque famille ne traduit pas seulement un souci égalitariste. Il définit un statut économique et social et assure à chacun, dans une société essentiellement agraire, les moyens de subsistance dont il a besoin. Le Rav Elie Munk note à ce sujet que l’autonomie économique ainsi octroyée à chaque famille « empêche la formation d’une classe de dépossédés et de prolétaires ». Elle bloque l’essor du paupérisme et les phénomènes d’exploitation du travail qui découlent de l’obligation pour les sans-travail d’accepter toute offre d’emploi quelles que soient ses conditions pour pouvoir subvenir à leurs besoins.  Bref, elle garantit que la sortie de la “maison d’esclavage” qu’était l’Egypte antique[8]Exode 20, 2.

et l’accès au statut d’hommes libres ne soient pas dénaturés par le développement d’une condition salariale susceptible de dégénérer en néo-esclavage.

Que la terre appartiennent à l’Eternel signifie par ailleurs qu’elle ne peut être considérée comme une simple marchandise que l’on acquiert et qu’on utilise à sa guise. La terre distribuée à l’époque de Josué a tout d’abord pour chaque famille d’Israël un caractère inaliénable. Elle peut certes être cédée mais la transaction ne constitue pas une vente ferme, elle s’apparente en fait à la cession du droit d’usage sur le nombre des années qui précède l’avènement du Jubilée, tous les cinquante ans, et est assortie d’un droit de rachat familial calculé selon le même principe.

 

Lévitique 25

23) La terre ne sera pas vendue définitivement, car la terre est à Moi, vous êtes seulement des habitants domiciliés chez Moi.

24) Et sur toute terre en votre possession, vous instaurerez le droit de rachat (délivrance) de la terre.

25) Lorsque ton frère se trouvera dans la gêne et n’aura d’autre choix que de vendre la terre qu’il possède, si vient son proche parent pour le délivrer, il délivrera le bien vendu par son frère.

26) Si un homme dont personne n’a pu racheter le bien pour le lui restituer trouve des ressources suffisantes pour pouvoir le racheter,

27) il comptera les années depuis la vente de sa terre et paiera le solde (jusqu’au Jubilée) à l’homme à qui il l’a vendue, puis il retournera sur sa possession.

28) Et s’il ne trouve pas les ressources suffisantes, son bien restera entre les mains de l’acquéreur jusqu’à l’année du Jubilée, il en sortira avec le Jubilée, et lui pourra retourner sur sa possession.

Le commandement du Jubilée, qui n’est pratiqué que lorsque la majorité du peuple d’Israël est présent sur sa terre, garantit ainsi à chaque famille en Israël la préservation de son statut social. En cas de difficulté ou d’échec économique, la terre peut être hypothéquée, voire vendue, mais son retour à ses propriétaires lors du Jubilée bloque la pérennisation des situations de pauvreté et leur perpétuation d’une génération à l’autre.

Le caractère non privatif de la terre s’exprime par ailleurs dans l’affirmation du droit des pauvres sur les produits de la terre. Outre la dîme, correspondant au dixième de la récolte, qui est versée aux pauvres lors de la troisième et la sixième année du cycle agricole de sept ans, la loi hébraïque commande aux agriculteurs de laisser aux pauvres la jouissance des coins des champs et de ne pas ramasser les épis tombés au moment de la moisson.

 

Lévitique 23

22) Et quand vous ferez la moisson de votre terre, tu ne complèteras pas la moisson des coins de ton champ et tu ne ramasseras pas les glanes de ta moisson, tu les abandonneras pour le pauvre et pour l’étranger, Je suis l’Eternel votre Seigneur.

Lorsque le propriétaire d’un champ s’abstient de récolter la totalité du produit de sa terre, il se remémore et valide le fait que si la possession du champ lui est reconnue, le produit de la terre n’est pas le fruit de son seul labeur mais avant tout un cadeau fait aux hommes par le Créateur de pouvoir se substanter dans un monde fertile et abondant. La même idée se retrouve dans le Shabbat de la terre qui intervient lors de la septième année du cycle agricole, nommée en hébreu Shemita.

 

Lévitique 25

1) L’Eternel parla à Moïse au mont Sinaï, pour dire :

2) Parle aux enfants d’Israël et dis-leur : quand vous serez entrés dans le pays que Je vous donne, la terre chômera un Shabbat pour l’Eternel.

3) Six années tu ensemenceras ton champ, six années tu travailleras ta vigne, et tu en recueilleras le produit.

4) Et la septième année, un Shabbat Shabbaton sera pour la terre, un Shabbat pour l’Eternel, tu n’ensemenceras ton champ, tu ne tailleras pas ta vigne.

5) Le produit spontané de ta moisson, tu ne le couperas pas, les raisins délaissés de ta vigne tu ne vendangeras pas, ce sera pour la terre une année de Shabbaton.

6) Le Shabbat de la terre sera pour vous, pour la consommation, pour toi, pour ton serviteur, pour ta servante, pour ton salarié, pour les étrangers qui résident près de toi.

7) Et pour ton bétail et pour les bêtes sauvages qui sont sur ta terre, tout le produit de la terre sera libre à la consommation.

Le droit de la terre au repos et l’interdiction de tout travail d’ensemencement, de moisson ou de vendange lors de la Shemita ne définit pas simplement une période de jachère. Le produit de la terre est en effet mis alors à la disposition de tous, hommes et animaux, annulant le droit exclusif des propriétaires terriens sur les produits de leurs champs. Toutes ces dispositions donnent corps dans une société alors essentiellement agricole aux valeurs de fraternité et d’égale dignité qui animent les relations entre les Enfants d’Israël. Valeurs qui ne peuvent se manifester que dans la limitation de l’emprise de la vie économique et des logiques d’appropriation privée qui la caractérisent sur la source de toute subsistance qu’est la terre.

Références

Références
1Rachi sur Nombres 26, 53.
2Psaumes 24, 1.
3Psaumes 115, 16.
4Genèse 2, 15.
5Elie Munk (1948), La justice sociale en Israël. Editions de la Baconnière, Neuchâtel (Suisse), p. 76.
6La traduction est de l’auteur, d’après les commentaires des Sages.
7A l’exception de la tribu de Levi qui, étant consacrée au service de l’Eternel, ne prend pas part à la distribution de la terre et se voit attribuer 48 villes et les pâturages qui les entourent (Nombres 35, 1-8 et Deutéronome 18, 1-2).
8Exode 20, 2.

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