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La techouva : devenir le blé et la vigne de Dieu

Un vent nouveau souffle sur l’État d'Israël : un souffle de grandeur qui nous pousse à revenir à nos sources, à une force bien plus grande que nous. Comment faut-il comprendre la téchouva ou littéralement le retour ? Est-ce un nouveau départ ou une réparation ? Peut-on vraiment effacer les erreurs du passé ?
La techouva : devenir le blé et la vigne de Dieu

Le lieutenant colonel Gay Madar a passé la fête de Simhat Torah 2023 à Kiryat Gat avec sa famille. En entendant les barrages de roquettes et les premières nouvelles du pogrom qui se déroulait dans les kibboutz autour de Gaza, il a, sans hésiter, foncé vers le front. Au péril de sa vie, il a protégé des civils, évacué des blessés et s’est battu avec un courage incroyable contre des dizaines de terroristes. Blessé à la jambe, il s’effondre finalement sur le côté d’une route, au milieu des corps de 20 terroristes. Lorsqu’enfin les renforts arrivent, ils voient, allongé au milieu des cadavres, un homme en civil, armé et couvert de sang. Le prenant lui aussi pour un terroriste, il s’apprêtent à l’abattre lorsque l’un des soldats hurle: Ne tirez pas, c’est un juif, je vois ses tsitsit! 

Ces franges rituelles, portées aux quatre coins d’un habit, sont devenues un des symboles de cette guerre. Les soldats demandent, par dizaines de milliers, non de la nourriture ou une couverture, mais un tzitzit katan, qu’ils appellent leur gilet pare-balles spirituel. 

Avi Johnny Ezri avec ses tatouages et ses piercings déclare: “je ne suis pas religieux mais j’ai décidé de porter des tsitsit pour mon âme, parce que je me sens connecté à quelque chose qui me dépasse.’’ 

Ronit ben Dror, fille d’un père combattant du Palmah qui n’a jamais fait ne serait-ce que le kiddouch pour Chabat, publie la photo de la lessive de Tsitsit katan flottant au vent et raconte: “Je lave et je pleure: Reviens en paix, soldat aux tsitsits que je ne connais pas”…

Un vent nouveau souffle sur l’Etat d’Israël: un souffle de grandeur qui nous pousse à revenir à nos sources, à une force bien plus grande que nous.

Comment faut-il comprendre la Téchouva ou littéralement le retour? Est-ce un nouveau départ, ou une réparation? Peut-on vraiment effacer les erreurs du passé?
Attardons nous tout d’abord sur le sens étymologique du mot. Le mot Téchouva vient de Lachouv, revenir. Mais peut on parler d’un retour vers un mode de vie que nous n’avons jamais vécu?
Pour mieux comprendre cela, revenons ( le mot est bienvenu) à la parole divine qui sera le départ de toute l’aventure de notre peuple. D’… demande à Avraham: “ Lekh Lékha”, littéralement “va pour toi”. 

Il y a dans cette mission, plusieurs niveaux de sens. Tout d’abord, aller pour soi, c’est comprendre que ce que le Créateur me recommande est tout simplement le meilleur conseil possible. Choisir d’écouter la voix divine, c’est faire le choix du mieux, d’un mode de vie qui, même s’il semble exigeant, est celui qui m’aide à grandir chaque jour et à vivre plus heureux.  

Ensuite, il y a la demande d’aller vers soi-même. Tout d’abord, d’apprendre à se connaître, s’accepter, et identifier en soi cette grandeur oubliée. Ensuite, d’arriver à faire passer cette grandeur du potentiel à la réalité de la vie.

La téchouva n’est donc plus un départ, mais un retour vers notre identité profonde, cette étincelle divine qui brille en nous et que rien ne peut définitivement étouffer.

C’est le sens tellement naturel du mot Téchouva, le retour, et de notre demande à D’… : “ Ramène-nous vers toi, ô Éternel, nous voulons te revenir; renouvelle pour nous les jours d’autrefois.” [1]Eikha 5,21

Mais qu’en est-il du passé? Une simple décision peut-elle effacer des actes et leurs conséquences?

Le Talmud [2]Talmud de Babylone, traité de Yoma 86b s’émerveille de la puissance de la Téchouva.  Rech Lakich nous enseigne qu’un “retour par crainte” transforme les fautes intentionnelles en fautes non intentionnelles et qu’un “retour par amour » les transforme même en mérites!

Quel est le mécanisme secret qui se cache derrière cette conclusion surprenante?

 

Explique le Rav Dessler, dans son Mikhtav Mé Eliahou [3]Mikhtav Mééliahou Tome II, p.80, que lorsque quelqu’un médite sur la grandeur de D’… et en arrive à regretter ses erreurs passées, il revient, suite à la crainte induite par la puissance divine. Cette perception est nouvelle et n’existait pas à l’époque de la faute! On peut donc considérer qu’à l’aune de la personne d’aujourd’hui et de sa perception du divin, les fautes antérieures étaient dues à l’ignorance. S’il savait à l’époque ce qu’il comprend aujourd’hui, il n’aurait pas fauté. Ses fautes alors intentionnelles se sont donc transformées en fautes par ignorance…

Mais le retour par amour lui, va beaucoup plus loin. Suite à sa remise en question, le fils revient chez son Père, assez penaud et un peu honteux. Lorsque le Père lui ouvre grand ses bras, se crée un amour immense qui n’avait jamais existé auparavant, qui est la conséquence naturelle du pardon. Secoué par la puissance de l’amour divin, notre cœur n’aspire qu’à lui rendre cet amour. Si l’on regarde les choses sous un angle un peu différent, la faute antérieure se retrouve être la source d’une intense connexion au divin. La faute nous a catapultés à un niveau que nous n’aurions jamais atteint tout seuls. Si l’on définit une faute comme un acte négatif qui nous abîme et une “mitsva” comme un acte positif qui nous construit, la faute d’hier s’est transfigurée en mitsva, par le mérite du retour, de cette capacité à se relever après la chute.

La Téchouva a bien la faculté de créer une réalité nouvelle en nous aidant à nous construire.

Munis de cet enseignement, nous pouvons comprendre sous un jour totalement nouveau ce verset du prophète Hochéa: “Ils reviendront, ceux qu’il abritait à son ombre et s’animeront tel la culture du blé, ils s’épanouiront eux-mêmes comme la vigne.” [4]Hochéa 14,8

Il est intéressant de noter que la renaissance d’Israël est comparée par le prophète à la floraison du blé et de la vigne. 

Rabbi Lévi Itshak de Berditchev, dénommé l’avocat du Peuple d’Israël, vus ses efforts infatigables pour défendre notre peuple, explique ce verset d’une brillante manière.

Beaucoup savent que lorsque nous travaillons un produit de la terre, la bénédiction à réciter avant sa consommation change. Par exemple, la bénédiction sur un quartier d’orange est “Boré péri haets”, nous remercions D’… qui a créé le fruit de l’arbre. Mais si, nous avons pressé l’orange, le délicieux jus de fruits frais deviendra “Chéakol” où nous remercions “celui qui a créé le monde par sa parole”, bénédiction plus générale adaptée au produit où le fruit n’est plus reconnaissable.

Le fruit est passé d’une bénédiction supérieure car plus spécifique “Haets” à une bénédiction inférieure “Chéakol” qui est la bénédiction la plus générale.

Il existe pourtant deux exceptions à cette règle: le blé et le raisin!

Sur le blé grillé, on récite: “ Boré péri Haadama”, qui crée le fruit de la terre, mais sur le pain on dira: “ Hamotsi Lehem min Haarets”, qui fait sortir le pain de la terre, la bénédiction la plus élevée, car la plus spécifique.

Sur le raisin, nous disons “Boré péri haets”, qui a créé le fruit de l’arbre mais, une fois pressé, il mérite la bénédiction du vin: “ Boré péri Haguefen”, hautement spécifique.

Le blé et le raisin sont donc les seules espèces qui, une fois brisées, deviennent encore meilleures et plus élevées qu’à l’état originel.

Voici comment Rabbi Lévi Itshak relisait ce verset: Lorsque le peuple d’Israël revient, il s’assoit à l’ombre de D’…, sous la Soukka. La fête de Souccot est la référence même du retour par amour, où après la Téchouva de Kippour, nous revenons vers D’… dans la joie.  

Alors, nous sommes comparables au blé et à la vigne, qui brisés, en sortent encore plus élevés. En effet, notre retour vers D’… étant un retour par amour, toutes nos erreurs antérieures se transforment en mérites, comme nous l’avons expliqué plus haut. Notre retour par amour fait de nous le blé et la vigne d’Hachem, car c’est justement de nos erreurs antérieures, de nos propres fractures, que nous avons su grandir.

Ce vent de retour vers notre identité la plus profonde, qui nous touche tous, quel que soit notre degré de pratique religieuse, est bien un merveilleux cadeau qui nous permet de voir le Peuple d’Israël dévoiler sa grandeur..

Que nous puissions tous voir le jour où s’accompliront les paroles du prophète: “ Et chacun demeurera sous sa vigne et sous son figuier, sans que personne vienne l’inquiéter, car c’est la bouche du D’… des armées qui le déclare”. [5]Mikha 4,4

Références

Références
1Eikha 5,21
2Talmud de Babylone, traité de Yoma 86b
3Mikhtav Mééliahou Tome II, p.80
4Hochéa 14,8
5Mikha 4,4

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