Le jour le plus long
Le 6 juin 1944 fut assurément l’une des dates les plus marquantes de la Seconde Guerre Mondiale. Ce jour restera dans l’Histoire » D Day », le « Jour J », où le carcan qui maintenait l’Europe sous l’occupation nazie, et qui semblait indestructible, se rompit enfin : une armada d’une ampleur sans précédent (cinq mille bateaux de guerre, onze mille avions et deux cent mille soldats) débarqua sur les côtes de Normandie. Le succès du débarquement fut tel que les forces alliées, poursuivant leur percée victorieuse, purent dans l’année qui suivit porter le coup de grâce au cœur même de l’Allemagne nazie, réputée invincible. La guerre au sein de la guerre, celle de l’hitlérisme contre le judaïsme, redoublait il est vrai de violence meurtrière, mais l’espoir revenait de la voir elle aussi bientôt s’arrêter.
Pour nous qui connaissons la suite des événements, une lecture superficielle de son déroulement pourrait nous conduire à nous demander si une opération d’une telle envergure pouvait de toute façon échouer. Mais si l’on examine les faits de plus près, force est de constater que victoire ou défaite ne tenaient qu’à peu de choses.
Ce peu de choses où les voies mystérieuses de la Hachga’ha se font soudain si lumineuses…
Par exemple, que faisait donc Hitler, au matin du Jour J ?
Le Führer endormi
Justement, ce matin-là, le dictateur dormait à poings fermés, après une nuit passée à festoyer. L’officier chargé de le réveiller en cas d’urgence prit connaissance des informations concernant les tentatives alliées de débarquement en Normandie : il en conclut semble-t-il qu’il n’y avait rien là de bien extraordinaire. En fait, il était terrorisé à l’idée d’avoir à réveiller le Führer, et de risquer de s’exposer à l’un de ses violents accès de colère habituels.
On peut certes comprendre cette attitude, et même ricaner de cette « grasse matinée », offerte à son insu à ce redoutable personnage. Mais où était alors, et que faisait donc le haut commandement allemand, parfaitement conscient depuis des mois des risques de débarquement des forces alliées ? Le plus brillant de ces généraux et haut-gradés était assurément Erwin Rommel, le fameux « renard du désert ». Il devait ce surnom aux remarquables qualités de stratège qu’il avait déployées jusqu’aux portes de l’Égypte, et qui avaient valu aux troupes allemandes de nombreuses victoires. Or Hitler avait confié à Rommel la charge de couvrir la côte atlantique, surtout dans sa partie nord, d’une ligne de fortifications (le célèbre « Mur de l’Atlantique »), destinées à empêcher toute tentative de débarquement des Anglo-Américains. Tous les experts militaires voyaient dans l’ingéniosité de Rommel la principale menace pour les Alliés.
Mais où se trouvait donc Rommel au matin du 6 juin ?
Le général en chef est aux abonnés absents
Après plus de cinq mois de préparatifs destinés à contrecarrer les plans du général américain Eisenhower, il avait jugé qu’il était urgent de rencontrer le Führer à Berlin. Pourquoi une telle visite, à ce moment précis ? Parce que Hitler venait de prendre une décision surprenante et qui préoccupait le « renard du désert » : méfiant à l’égard de ses généraux, le dictateur s’était attribué le commandement exclusif de l’imposante division blindée déployée en Normandie. Or, si un débarquement avait lieu, Rommel devrait sur le champ utiliser ces précieux blindés. Et attendre une autorisation de Berlin pourrait lui faire perdre des heures précieuses et fatidiques !
Alors que l’armada alliée approchait des côtes normandes, Hitler dormait donc à poings fermés, et son charismatique chef de guerre se trouvait lui aussi à Berlin. Pour raisons personnelles. Certes, il voulait avant tout obtenir carte blanche dans le commandement des blindés, mais il voulait aussi prendre quelque repos bien mérité après des mois de grande tension, à surveiller cinq mille kilomètres de côte et à anticiper les intentions de ses adversaires. Et puis, et peut-être surtout, il y avait comme par hasard, justement ce 6 juin, l’anniversaire de sa chère épouse…
Rommel avait d’ailleurs de quoi se justifier pour quitter momentanément le front : les prévisions météorologiques annonçaient la persistance des vents violents et des orages qui s’étaient abattus sur le nord de l’Europe, rendant un débarquement hautement improbable.
Le mauvais temps préoccupait aussi le général Dwight D. Eisenhower, nommé à la tête des forces alliées : sa flotte avait reçu l’ordre de prendre la mer le 5 juin, mais avait dû y renoncer à cause des orages. Or, dans la journée du 5 juin, Eisenhower avait reçu un communiqué de météo prévoyant une éclaircie pour le 6 juin au matin. Si Rommel avait attendu quelques heures, il aurait certainement reçu lui aussi cette même information…
Le mystère demeure sur les raisons qui poussèrent Eisenhower à tenter ce coup de poker éminemment dangereux : il savait bien que les conditions météorologiques étaient déterminantes pour ce genre d’entreprise et pouvaient, à elles seules, provoquer la plus grande défaite militaire de tous les temps ! Sans pouvoir lui-même expliquer, après coup, quels avaient été les motifs précis de sa décision finale, il lança l’ordre qui allait changer la face des choses…
Un enchaînement de faits peu ordinaire
Il faudrait encore ajouter, à cet enchaînement en soi étonnant de circonstances providentielles, quelques détails stupéfiants :
- l’état-major allemand avait ainsi programmé, justement pour le 6 juin, des manœuvres qui allaient éloigner de la zone des combats une demi-douzaine d’officiers de haut rang. Il s’agissait justement pour eux de simuler… un débarquement allié en Normandie !
- il ne restait en Normandie que deux avions de combat. Les 123 autres participaient aux manœuvres ou s’entraînaient dans le centre de la France. Lorsque l’officier resté sur place reçu l’ordre, venu du quartier général, de se mettre en état d’alerte, il ne put que hurler au téléphone : » Je suis en état d’alerte, et mon second pilote aussi ! Nous sommes en état d’alerte bande d’idiots, mais vous ne nous avez laissé que deux avions ! «
Une morale, à cette histoire ?
On pourrait bien sûr se contenter de dire qu’il ne faut jamais quitter le front pour rendre visite à sa femme, sous prétexte que c’est son anniversaire…
Mais, plus sérieusement, le meilleur enseignement se trouvera certainement chez le roi Salomon, qui nous éclaire dans sa grande et proverbiale sagesse :
» Le cœur des rois et des princes est dans la main de D.ieu. » (Michlei / Proverbes 21,1).
Qui, en effet, aura pu pousser Eisenhower à se lancer à l’attaque, malgré le grave danger encouru ?
Qui aura donné à Rommel l’idée de quitter le front juste à ce moment précis ?
Qui aura fait naître, un 6 juin quelques décennies plus tôt, un bébé qui deviendra la femme de Rommel ?
Qui aura incité Hitler à prendre personnellement, décision absurde, le commandement des blindés de Normandie ?
Qui l’aura fait profondément dormir, ce matin dramatique, et qui aura paralysé toute réflexion logique chez son aide de camp ?
Qui aura inspiré à l’état-major allemand l’idée, a posteriori saugrenue, d’effectuer des manœuvres et de ne laisser que deux avions dans ce qui allait devenir la zone du débarquement ?
Qui aura agencé tant d’autres « coïncidences » troublantes, comme la soudaine éclaircie météorologique ?
Dans cette grande guerre qui secouait le monde, et dans cette guerre particulière qui visait à l’extermination du peuple juif, les voies de la Hachga’ha, la Providence divine, se frayaient leur chemin…