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Wir sind Juden ! Les éclaireurs israélites dans la résistance française.

Ce récit est tiré pour l’essentiel, des comptes rendus écrits par Jean-Émile Hirsch (1922-2020), cousin de ma mère, qui a été le premier à mettre le pied dans ces montagnes pour rechercher un lieu de vie pour les futures recrues, aidé par la résistance locale. Il a été rapidement rejoint par son frère Georges et son père Edouard. Il assurait le secrétariat du maquis dont le journal n’a pas survécu à l’attaque du 8 août où il est parti en fumée avec la ferme qui servait d’abri. Il a mis un point d’honneur à reconstituer la vie du maquis après la guerre. Pour en savoir plus s’adresser au musée de la résistance à Vabre et se reporter aux ouvrages des acteurs¹
Le maquis de l’Espinassier

Wir sind Juden ! « Nous sommes Juifs ! » Ce cri a été poussé à plusieurs reprises par les résistants juifs pendant qu’ils désarmaient les soldats allemands au matin de leur reddition du train parti de Mazamet et qu’ils venaient d’arrêter : Ces résistants venaient de participer à l’attaque du train, que l’armée allemande avait lourdement armé pour quitter Mazamet. Les Allemands se sont rendus après l’attaque de nuit. Environ 60 Allemands pas fiers du tout dont certains pleuraient et ce cri ne les a pas rassurés du tout ! Ces résistants juifs étaient membres du groupe de la compagnie Marc Haguenau qui faisait partie du maquis de Vabre et plus globalement de celui de la Montagne Noire. C’était le 20 août 1944. Ces mots symbolisent la solidarité et la fierté de ces résistants, après toutes ces années de lutte, de douleur et de peurs. Comme l’a dit Vladimir Jankélévitch « Survivre était déjà un acte de résistance pour les Juifs ! »

Mais revenons en arrière, d’où venaient, qui étaient ces jeunes juifs qui se retrouvaient au fin fond des montagnes sauvages du Tarn ? Ils faisaient partie du mouvement des éclaireurs israélites de France, et le plus jeune avait 17 ans et le plus âgé, un officier, vétéran de la Grande guerre en avait 50 !

Les Éclaireurs Israélites de France (EIF) ont joué un rôle important dans la Résistance française durant la Seconde Guerre mondiale, dès le début du conflit en 1939. En tant que mouvement de jeunesse juif, ils ont maintenu leur engagement en aidant à la protection des membres de leur communauté, en organisant des activités clandestines, et en participant aux actions de résistance contre l’occupant nazi.

 

La lutte des Éclaireurs Israélites dès 1939.

Les EIF, mouvement de jeunesse juive créé en 1923 par Robert Gamzon, totémisé « Castor soucieux », était structuré autour d’unités appelées patrouilles au sein de troupes par ville et par quartier pour redonner aux jeunes une activité physique dans un milieu juif et des camps de vacances, à la manière paramilitaire de Baden Pauwels dès le début du siècle. Cette structure a permis au moment de la guerre de mailler le territoire. Robert Gamzon, mobilisé pour la première bataille de France et démobilisé, démoralisé par la défaite, a tout de suite organisé le mouvement selon 3 axes principaux :

  1. Planquer les enfants et jeunes gens juifs étrangers séparés de leurs parents par les arrestations et leur permettre de survivre dans un environnement sain et utile dans des fermes école. Le projet s’inscrivait dans le « Retour à la terre » prôné par le gouvernement de Vichy et pouvait recevoir des financements. Les plus jeunes sont d’abord réfugiés ensemble dans des maisons d’enfants. Les regroupements devenant dangereux, ils ont été dispersés et placés chez des personnes sûres dans des fermes ou chez l’habitant, dans de nombreux hameaux dans les montagnes des Alpes, du Jura et du Massif Central comme au Chambon sur Lignon et la Vallée du Gijou qui vient d’être décorée comme « Vallée des Justes » à l’occasion des 80 ans de ces évènements à la mi-août 2024.
  2. Organiser pour les plus âgés des départs clandestins vers l’Espagne via la traversée à pied des Pyrénées dans le but d’émigrer en « Palestine » et pour des enfants plus jeunes et des familles, organiser des passages clandestins vers la Suisse, pays neutre où des structures d’accueil se concrétisaient. Tout cela nécessitait de l’argent, des faux papiers, des renseignements, des filières bien organisées mais très cloisonnées. Nombre de jeunes chefs y ont laissé leur vie pour en sauver les autres.
  3. À partir de 1943 et le tournant :
    • de la défaite des allemands à Stalingrad en Russie,
    • du débarquement des Américains au Maroc puis en Algérie,
    • de la suppression de la zone libre par les Allemands qui ont occupé tout le pays et la généralisation des arrestations et de la pression du Service de travail obligatoire qui pesait sur tous les jeunes Français, l’idée d’un « maquis des juifs » s’est imposée comme une autre activité indispensable. C’est ainsi que fin 1943 a commencé l’installation de jeunes gens en âge de porter des armes dans les montagnes du Tarn. Ils venaient des chantiers de jeunesse, des rescapés des fermes écoles, comme Lautrec, des maisons d’enfants comme Moissac. Mais d’armes il n’y en avait pas.

 

Ils ont logé dans plusieurs fermes en ruine, d’abord la Malquière, puis Laroque et Lacado. Ils ont obtenu l’homologation par Londres, d’un terrain d’atterrissage, dénommé Virgule, où sont arrivés des instructeurs et des armes. Le mot de passe était répété à la radio de Londres, « Le chargeur n’a que 20 balles », ou « le chargeur n’a que 3 fois 20 balles » quand 3 avions étaient prévus. Les parachutages ont permis de se fournir en armes, munitions, etc. Tout était récupéré et utilisé, les toiles de parachute, les emballages des « colis », et aussi des vêtements, chaussettes, etc. avec lesquels les armes étaient calées. Il y a eu, dès juin1944, 7 parachutages dont le dernier dans la nuit du 8 août 1944 a été tragique.

Entourés, protégés, ainsi que de nombreuses familles juives, par la population essentiellement protestante dans ces montagnes de tradition résistante qui les nourrissait aussi, ils se sont formés par la préparation physique et mentale aux différents types de combats.

À partir du débarquement américain de Normandie le 6 juin 1944, les troupes d’occupation sont devenues très nerveuses et enragées de vengeance devant leurs défaites. La mission dévolue aux maquis et en général aux résistants était de harceler les troupes allemandes qui remontaient pour renforcer les défenses allemandes sur les côtes de la Manche et de l’Atlantique, et qui commettaient exactions sur exactions comme la division Das Reich qui a massacré les habitants d’Oradour sur Glane le 10 juin 1944, après avoir sévi tout au long de son parcours, à partir de Montauban.

Le maquis EI prend le nom de Compagnie Marc Haguenau, un de chefs EI très aimé, tué par les Allemands à Lyon. Cette compagnie est rattachée au maquis de la Montagne Noire commandé par « Pol Roux », alias de Monsieur Guy de Rouville (1915-2016) habitant à Vabre. Ses membres participent à une formation quasi militaire par les quelques officiers que comptent leurs rangs dont Gilbert Bloch (1920-1944) pour les entrainer physiquement au combat, au maniement des armes etc. Cette formation s’intensifie en juin et juillet 1944 avec de nouvelles recrues.

La nuit du 8 août, un parachutage annoncé tourne au drame car les Allemands ont eu vent de cette action et vont encercler les fermes et le terrain de parachutage. Au terrain, cela se solde par l’abandon et la perte de la cargaison parachutée mais les fermes qui servent de cantonnement sont attaquées, incendiées et les occupants qui en assuraient la garde tués. Les pertes humaines dépassent 10 dont 5 du groupe EI, tous enterrés sur place, au cimetière de Viane.

Mais les semaines suivantes sont les 2 semaines de gloire de ce groupe engagé dans la prise du train de Mazamet, le 20 août, de la libération de Castres le 22, et la reprise de Mazamet où restait un groupe armé qui finit par se rendre. Les officiers et les soldats allemands (4800 prisonniers) se sont trouvés bien étonnés de voir l’âge et le nombre de leur vainqueurs qui virevoltaient autour d’eux dans une espèce de danse du scalp, pour vérifier leur désarmement.

La grande réussite de ces combats, c’est que les défilés dans les villages, les accrochages surprise, ont été le fait de soldats bien habillés en kaki, coiffés du béret alpin, bien armés grâce aux parachutages et ont donné l’illusion aux Allemands d’un grand nombre de soldats. Alors qu’ils n’étaient que 400 !

Les habiles négociations pour la reddition du train, celle des garnisons allemandes de Castres et de Mazamet ont permis d’éviter de grandes effusions de sang grâce aux talents de ceux qu’on surnommait « Le Vieux Chef » Pierre Dunoyer de Segonzac, « Pol Roux » Guy de Rouville, « Castor » Robert Gamzon, âgés de 30 à 40 ans, 3 éducateurs hors pair qui continueront leur œuvre après la guerre.

Entre temps, l’armée du Maréchal de Lattre de Tassigny avait débarqué en Provence le 15 août 1944, et remontant la vallée du Rhône, atteignait Beaune, Dijon… La période « Maquis des juifs » se terminait pour les EI dont la plupart ont été incorporés dans un corps du 3ème Dragon puis du 12ème Dragon, qui a rejoint en Bourgogne à Autun, le 7 septembre, la 1ère armée, pour participer aux très durs combats dans les Vosges et en Alsace pendant l’hiver 44, où les Allemands continuaient à résister pied à pied. Les EI ont fini leur campagne au lac de Constance bien après le 8 mai 1945. Ils n’ont été démobilisés qu’à l’automne 1945 après un défilé victorieux à l’Arc de triomphe de Paris.

 

¹ https://maquisdevabre.fr/temoignages/de-vabre-a-larc-de-triomphe/

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